Spontus a été créé en 1996 par quatre lycéens d’Auray.
Ils remportent le concours interlycées de musique traditionnelle « Félix Le Dantec » en 1997 et se font rapidement remarquer pour leur grande maîtrise instrumentale et leur très bonne connaissance du répertoire traditionnel. Avec « Ar Lagad Bleiz » c’est le 9ème opus du groupe.
Youen Paranthoën nous en dit un peu plus…
Bonjour Youen, peux-tu nous rappeler comment est né le groupe Spontus ?
Salut Thomas. Et bien, oui, pour participer au concours interlycées, au printemps 1996… ça fera 30 ans l’an prochain … En fait on se connaissait déjà tous depuis le collège, je jouais un peu avec Erwan, et avec Alan bien sur.
Vous êtes fins connaisseurs de votre terroir originel du Pays Vannetais et depuis vos débuts vous avez cherché à vous renouveler avec des propositions inédites. Peux-tu nous en dire plus sur cette démarche permanente du groupe et votre fonctionnement de création au quotidien ?
Oui, depuis le temps, avec 9 albums, c’est vrai qu’on a expérimenté dans tous les sens ! Les 2 premiers disques sont assez classiques, après on a commencé à travailler sur une formule plus ouverte et improvisée (albums 3 et 4), ensuite on a passer du temps sur les structures mélodiques, et les rôles de chacun dans le groupe. C’est aussi à ce moment là qu’on a décidé de ne jouer que des compositions. Ensuite il y a eu le projet avec le Catalan Manu Sabaté. Projet de musique de concert. Puis ensuite LAB, spectacle où les danseurs dansent autre chose que les danses de fest noz. L’album 8, « la danse est enivrante » on a commencé à chanter… Oui, démarche permanente et remise en question, pour aussi trouver un son qui nous plaise … et continuer de proposer des nouvelles choses aux danseurs.
Pour cet album vous avez fait le choix de prendre le micro et de chanter en breton et en français tout en vous accompagnant. D’où vient cette envie ? Comment s’est-elle construite ?
C’est une vieille envie à vrai dire. On avait eu la chance de faire un disque en 2002 avec les chanteurs de Pluvigner (kanerion Pleuigner), un groupe de chanteurs de notre coin. On les avait accompagné et ça nous a beaucoup marqué : la puissance du chant à capella. En 2020, on a eu envie de revenir à un répertoire un peu plus épuré que ce qu’on avait pu faire par le passé. Et on parlait souvent de ce disque avec les kanerion, mais aussi de nos goût communs pour la musique américaine folk, avec guitare violon et contrebasse, la musique québécoise et la musique cajun, et se dire que ça serai cool d’avoir des danses bretonnes avec un peu cette énergie là. Et puis après le projet LAB où on danse en jouant et on se roule par terre pendant le spectacle, on s’est dit qu’on était mûrs pour chanter. J’ai donc écrit des nouvelles compositions, et j’ai cherché des textes trad à adapter à ses compos (en réalité, on à fait les premières maquettes avec juste 1 strophe répétée 10 X avec un petit coté « yaourt » dans le chant quand même). Et puis on est allé rencontrer Nolùen Le Buhé, en lui disant qu’on allait avoir besoin d’un gros coup de main !
Quel est votre rapport à la langue bretonne ? Êtes-vous tous bretonnants au départ ou avez-vous appris pour la genèse de l’album ? Comment avez-vous été épaulés ?
Aucun de nous n’est bretonnant. On a tous un peu appris au lycée, puis certains ont continué à la fac, en faisant des stages. Mais on ne parle pas … on a donc du se faire aider très fort par Nolùen comme je le disais pour l’adaptation des textes, et surtout leur prononciation.
Dans l’album on retrouve des textes de différents auteurs, comment les avez-vous choisis et qui sont-ils? Ces textes sont-ils tous inédits ?
On a choisi les auteurs parce que ce sont des gens qu’on connaît un peu, et qu’on aime leur travail et leur rapport à la langue justement. Pour les textes en Breton : Patrick Dréan, Marthe Vassalo et Elouan Le Sauze. Et pour les textes en français, Bertran Obrée et Sylvain Girault. Et oui, les textes sont inédits.. Elouan a par contre enregistré une très belle version de son texte en complainte (alors que nous la chantons en gavotte pourlet).
Comment percevez-vous l’écosystème du fest-noz et de la musique bretonne actuellement et comment imaginez-vous les perspectives d’évolution durant la prochaine décennie?
Arfff ! C’est tellement varié et mouvant… est ce que les choses ont vraiment changées depuis 30 ans ??? Oui, on va dire dans la fréquentation, c’est de plus en plus rare de voire des soirées avec des gens qui viennent au fest-noz parce que c’est la fête dans le bourg. C’est un peu dommage parfois, ça fait un peu hors-sol ! Mais seulement parfois ! Paradoxalement, c’est dans les scènes d’été, touristiques, qu’on retrouve le plus de spontanéité et de diversité dans le public. Avec des touristes qui se demandent ce qu’ils foutent là, à se retrouver au milieu d’une bande d’indiens à tourner en rond en se tenant par le petit doigt !
Propos recueillis par Thomas Postic.