Rencontre avec Thomas LOTOUT, sonneur de bombarde et compositeur, bien connu dans le milieu de la musique bretonne…
Peux tu nous parler de ton parcours musical ? Comment es tu arrivé jusque là, de tes débuts à aujourd’hui ?
Alors, j’ai commencé la bombarde à 7 ans, en 1990, avec mon voisin David Pasquet, puis ensuite nous (avec mon frère Joseph) sommes allés au bagad des blés d’or à St Nicolas où nous prenions des cours avec Gaël Nicol. En 1994, j’ai intégré le bagadig de la Kerlenn Pondi et j’ai suivi en parallèle des cours au conservatoire avec Laurent Bigot jusqu’à mes 15 ans qui m’a transmis énormément de choses, un état d’esprit surtout. On allait aussi voir les sonneurs et chanteurs du coin pour faire le répertoire, Daniel Phillipe, Jacky Hétet, Jean Elie, Marcel Guillou,etc… J’ai commencé à animer des mariages très tôt, vers 9 ans. Ensuite à 11 ans, le premier fest noz avec les frères Lotout à l’affiche, je n’ai eu le trac que plus tard, là, j’étais sur un nuage . Et après c’était parti, on a beaucoup sonné et un peu partout, on a été très souvent sur Paris en couple. Je suis franchement un sonneur de couple à la base, je joue toujours aujourd’hui mais plus avec Joseph.
Peux tu nous parler des différentes formations/groupes dans les lesquels tu as joué ?
J’ai commencé à jouer en groupe quand j’étais au lycée à Quintin et mes collègues étaient sur Lannion, les gars de Chupenn Gleb. Mon bagad était à Pontivy à l’époque, on avait pas mal de plans en couple aussi, on était fin des années 90, début du millénaire, et c’était bien cool. Bref, bilan carbone catastrophique, y’a eu pas mal de train, de bus, « de mamie tu peux m’amener? », je savais jamais trop où j’allais dormir mais c’était rigolo, je suis nostalgique de cette époque. Ensuite, de 2001 jusque 2010, y’a eu la période Winaj’h en deux cessions, une trio qui a bien marché avec les cousins Bodros et une à 5 avec moins de succès mais j’en connais qui écoutent toujours le disque… je co-dirigeais aussi le bagad de Pommerit de 2005 à 2008 et j’avais monté une boîte qui vendait des légumes bio en circuit court et ça m’en demandait beaucoup. Puis, il a fallu que je fasse TiTom qui tourne depuis 2010. J’ai aussi joué dans Loened Fall plusieurs années, et actuellement je sonne avec Willy Pichard en duo (et parfois en trio) . J’ai eu l’occasion d’être invité par pas mal de groupes pour des remplacements ou créations occasionnelles (fest noz, bombarde et orgue, orchestre symphonique, baroque, blues, world, etc..) sans compter les compères occasionels en couple…
En ce qui concerne ton groupe « Titom », peux tu nous en faire une petite présentation ? (l’origine de l’idée, la construction du groupe, l’évolution du groupe, les différents albums et éventuels futurs albums)
Le groupe est parti d’une rencontre avec Stéphane De Vito le bassiste, qui aimait bien mes compos, je voulais aussi sonner à nouveau avec Yannig Alory à la flûte, avec lequel j’avais déjà fais de la scène en tant que remplaçant dans Carré Manchot. Je connaissais Raphaël au violon, il appréciait aussi ce que je faisais à l’époque. Ca c’est la base historique qui est toujours là. On a eu plusieurs batteurs; Mickaël Bourdois, Patrick Boileau et maintenant JC Boccou, tous très bons. En 2011, Gaëtan Grandjean est venu remplacer Fabrice Beaumin au bouzouki qui a quand même fait un gros boulot sur le premier album. Au départ, on voulait faire plus de concerts, on arrive encore l’été ou dans les festivals à l’étranger à placer nos morceaux différents de ceux qu’on joue ici le samedi soir. J’aime bien sonner ces morceaux qui se trouvent parsemés sur nos 4 albums studios et qui ne se dansent pas, quand par exemple on est invité dans une féria de 15000 personnes et que ça pogotte devant… Ici, on est maintenant catalogué groupe de fest noz, du coup, on prépare un live sur plusieurs dates en 2017 avec quelques inédits, là, ce sera du fest noz pur pour marquer le coup. On commence les enregistrements le 16 avril à St Nicolas du Pélem. Ensuite, je ferai un album dit « concert » en studio avec des invités et des morceaux progressifs, des couleurs différentes, bref, un truc qui me prendra bien la tête et j’ai hâte de commencer. J’ai déjà une partie des morceaux.
Quelles sont selon toi les clés de la réussite de ce groupe ?
La réussite est assez relative, c’est pas la folie non plus.. et c’est loin d’être un échec mais je vois bien qu’on en dérange pas mal, et je le leur rends bien. Donc, de ce côté là, s’il y a des jaloux, c’est que ça donne l’impression que ça marche pas trop mal. On est aussi une équipe qui se fait plaisir sur scène et en dehors, mes collègues ont de la bouteille et ça évite pas mal d’erreur d’égo et qui peuvent faire exploser des groupes.
Il y a une autre facette que la musique que j’aimerai aborder avec toi, c’est ton engagement auprès des migrants, qu’est ce qui t’a amené à t’investir auprès de ces personnes ?
C’est un drame personnel qui m’a amené à aller sur Calais. Puis j’ai rencontré des gens formidables là-bas, beaucoup de bretons d’ailleurs et j’y suis retourné, puis je suis allé sur Paris également. Je m’occupe aussi de collectes ici, et parfois de l’accueil des familles qui arrivent. Notre repli est dangereux, le monde devient inquiétant. J’ai l’impression de vivre « le monde d’hier » de Stefan Sweig…
Le sujet est épineux, j’entends des réflexions tellement d’un autre temps, mais il y a plus de gens bienveillants qu’on ne le pense, après c’est de confier des médias (y compris en local) et du pouvoir à des imbéciles qui est dangereux.
Que veux tu nous en dire de plus ?
Le fest noz n’appartient à personne, la musique bretonne non plus. Merci aux organisateurs bénévoles et spontanés qui font que des artistes arrivent à rester libres. C’est assez unique ce qui se passe en fest noz là-dessus quand même et je redoute le jour où ça disparaîtra.
As tu des projets à venir ?
Le live TiTom, l’album studio, le trio, le bombarde et orgue et continuer d’apprendre mon métier.